Et la lame encore tachée de sang...

- Ce que je recherche est au delà de l'argent et du prestige, et un combat, quel que soit sa nature, ne doit pas être interrompu. Il n'y a eu aucun mort et il n'y en aurait aucun si vous n'y aviez pas ajouté votre prétention de grande héroïne ne désirant que le bien de tous et voulant cesser un simple entraînement, effrayée simplement par la vue du sang... Pourquoi n'auriez-vous pas fait face pour stopper le combat? Etes-vous trop lâche pour agir dignement?

Non mais pour qui elle se prenait? Elle n'avait rien à faire là, personne ne lui avait rien demandé. Il n'était certes pas en état de combattre, mais son orgueil voyait un être incapable de tenir une lame et juste bonne à frapper de dos... Elle était là l'exemple typique de ceux qu'il déteste le plus au monde. Elle n'était pas digne de porter une épée... Si seulement il n'avait pas encore l'esprit flou... Peut être l'aurait-il tué, peut être l'aurait-il seulement humilié... Il n'était pas rancunier, mais lorsqu'on lui porte un coup, il ne supporte pas de ne pas pouvoir répliquer... Il espéra qu'elle tente quoi que ce soit, il espéra qu'elle fonce vers lui en brandissant la lame, ainsi pourrait-il faire de même... Il n'avait pas l'habitude de tuer lorsque l'autre n'est pas prêt à combattre...

Il se sentit alors mal, comme lorsque l'on fait beaucoup d'efforts habillé chaudement en plein été... Pendant un moment, il ne vit plus rien. Il ne baissa pas sa garde pour autant, il n'aimait pas montrer ses faiblesses. Il espéra juste qu'elle n'attaqua pas pendant ce malaise, et que ce dernier ne dure pas... Mais que lui avait-elle donné à boire, à la fin? Il doutait que ce ne soit vraiment de l'alcool, il ne se sentait pas saoul... Peut être du poison... mais pourquoi l'empoisonnerait-elle? Non, c'est peut être une allergie, mais il n'avait jamais été allergique à quoi que ce soit jusqu'à présent...

Faera ne put réprimer un sourire face à ce que lui disait cet homme, décidément non seulement il avait l'air d'avoir un égo surdimensionné mais en plus il était encore plus bête que la moyenne! Il la jugeait à la va vite, à moins que ça ne soit une provocation... Peut-être était-ce les deux à la fois. Faire face? Lorsque les deux combattants étaient au corps-à-corps? Il manquait pas d'imagination... Et de paradoxes, selon lui un combat ne devait être stoppé sauf si on se mettait entre les deux combattants? Quelle stupidité, sauf si on souhaite mourrir vite. Ce jeunôt ne connaissait manifestement pas les lois injustes de la vie, celles qui disaient par exemple "les vivants agiront toujours plus que les morts". Lâcheté ou honneur, peut importe, si on meurt on ne pourra plus être adepte ni de l'un ni de l'autre.

«Amen, dit Faera avec un sarcasme non caché. Mais vous tuer ici et maintenant, dans votre état minable, si on suit votre code aussi "pur" que candide, ne serait pas honorable.»

C'était bien une provoquation également, mais Faera comptait bien prouver ses dires, raison pour laquelle elle dégaina son épée et frappa la dague de l'homme avec avec un relatif ménagement, la seule chose qu'elle voulait faire était désarmer l'homme devant elle. Elle laissa sa main droite de libre, ne prenant pas son écu.

S'il n'arrivait pas à tenir sa dague, peut-être pourrait-il admettre lui-même qu'il n'était pas en état.

" Il vous sera aisé de le faire, maintenant. Quand ce n'est pas à un adversaire qui ne vous fait pas face, c'est contre un adversaire malade et drogué par des substances inconnues que vous combattez... Dites-moi, quel est votre but dans la vie? A ce que je vois, il est lié à votre épée... Et bien sachez que vous n'arriverez à rien en procédant toujours ainsi. Certes vous vivrez plus longtemps, mais vous ne pourrez jamais devenir forte. Et si vous parvenez ainsi à vos fins dans toutes circonstance, votre geste n'aura rien d'héroïque, mais relèvera du pur assassinat. Comment espérez-vous que les gens vous verront? Si vous vous en foutez de l'honneur ainsi que ce qu'on peut appeler de combat loyal, ce n'est pas le cas de la plupart des personnes. Et si vous n'avez que faire des autres, pourquoi avoir intervenu aujourd'hui? Peut être qu'une femme peut se permettre d'être lâche, d'avoir peur de combattre ou de frapper par derrière, il n'empêche que vous portez une épée, et que je traite ceux qui portent une épée comme tel. Alors si vous ne vous en sentez pas capable, troquer là contre un bâton, c'est plus pratique pour assommer par derrière."

Sur ce, il s'en alla. Cette femme le dégoûtait. Elle se prenait pour une grande combattante, mais elle mourra comme un chien. Il lui faudra juste prendre un peu de repos avant. Puis, quand viendra la nuit, elle comprendra la véritable injustice de ce monde... Il n'aimait pas assassiner des épéistes, mais elle n'était pas de ceux-là...

Seraphina restait sagement en retrait, écoutant attentivement. Elle s’amusait bien. C’était tellement intéressant ! Rien ne l’amusait plus que d’observer le comportement humain (ou le comportement des êtres vivants, plutôt). C’était tellement fascinant de sentir évoluer toutes ces personnes si différentes ! Alors qu’on faisait une remarques, certains s’énervaient, d’autres riaient, ou encore ne montraient qu’un sorte de lassitude, de neutralité plate. Tout ces caractères tellement différents ! Tellement complexes ou au contraire si faciles à comprendre ! Quelle diversité ! C’était si…appétissant à étudier !Certaines personnes s’insurgeaient quand Seraphina disait qu’elle étudiait le comportement des gens…Non, on ne peut faire cela ! L’on ne peut qu’étudier le comportement animal ! Mais ces répliques donnaient raison à la jeune nécromancienne. Les gens sont des animaux comme les autres ! Certes, ils parlent. Mais les animaux parlent aussi, dans une…autre langue. On est doté d’intelligence. Certains animaux sont plus intelligents que certaines personnes parfois…Et puis, il est préférable parfois de préférer les animaux ! En effet, ils seront bien plus fidèles, moins hypocrites, traîtres, que certaines personnes ! Bref. Seraphina était comblée. Elle avait deux…Spécimens très intéressants sous la main…Elle n’allait pas les laisser s’enfuir si facilement ! Parce qu’elle pensait bien que leurs histoires devaient être très fascinantes. Oui, autre passion de Seraphina. La vie des gens. Tout ces drames familiaux, ces complots, trahisons, ou autre,…Elle adorait entendre ça !Elle sentit que l’homme s’en allait. Que faire ? Le suivre ? Non, elle restait un moment avec Faera, puis après elle le suivrait. Elle ferait comme quand elle était toute gamine et qu’elle vivait avec les loups…Elle pisterais à l’odorat…Pour éviter que la femme n’attaque le combattant, Seraphina posa la main sur le bras de Faera :



- Faera, ne répondez pas à ses provocations, il ne mérite pas votre attention…Et comme il la’ lui même dit, ce serait un peu déloyal de combattre contre un homme qui n’est pas très en forme…



Elle avait dit cela le sourire aux lèvres, mais sa voix était grave, apaisante mais sérieuse. Elle préférait garder les yeux fermés. C’était un peu ridicule de tenter de regarder quelqu’un dans les yeux alors qu’on était totalement à coté de la plaque. Elle continua :



- Je vous remercie tout de même d’avoir intervenu. En fin de compte, peut-être qu’il m’aurait tuée. Mais peu importe, vu que ça n’est pas arrivé.



Elle disait ça souriante, mais elle réfléchissait. Et s’il elle le suivait plus tard, comment réagirait-il s’il s’en apercevait ? Mais non…Il ne s’en apercevra sûrement pas…Mais qui sait ? Mais…il était parti comme ça sans dire au revoir ?! Hé bah, ce n’était pas la politesse qui l’étouffait !Mentalement, Seraphina s’insurgeait de ce manque de courtoisie. Elle ne savait pas pourquoi elle se sentait vexée comme ça. Il n’y avait pas de raisons… C’était sans doute parce que ça l’amusait de s’insurger d’un tel infime détail. Gaminement, elle lui tira la langue, même si elle ne savait pas si il était déjà loin.

- Nan mais quel malotru!

Cet homme était étrangement puérile pour quelqu'un qui se prétendait défenseur de grandes valeurs. Toujours à la juger, c'était vraiment... Hypocrite. Il provoquait à tout va et lorsqu'on répondait à ses provocations, chose que n'avait pas faite Faera car si ça avait été le cas il eût déjà été mort, il osait insulter les gens de lâches de part son état. Vraiment hypocrite, si on n'est pas en état de combattre, on ne provoque pas les gens pour ensuite prétexter qu'on n'est pas en forme! C'était un manque flagrant de responsabilité et de maturité... Et une belle preuve d'hypocrisie. Tuer reste tuer, peu importe les condition, le résultat est toujours le même. De plus, à en croire ses déclarations, si la plupart avait jugé honorable d'assomer quelqu'un dans le dos il eût pensé ainsi également car la façon dont les gens le voyaient était plus importante que sa propre façon de pensée. Elle n'avait déclaré "se foutre des autres" et depuis quand tuer quelqu'un en combat était-il foncièrement différent que de tuer quelqu'un dans son sommeil? Cet homme là ne s'était sans doute possible jamais remis en question. L'avoir épargné était une erreur, car Faera sentait qu'elle s'était fait un ennemi juré. Et comme le disaient certains "le vainqueur est celui qui reste en vie".

Bien que Seraphina lui conseillait de ne pas se préoccuper de lui, Faera sentait que c'eût été une erreur supplémentaire, largement suffisante pour être fatale. Le fait qu'elle lui rappelle ses paroles l'agaça pronfondément. Puis elle lui dit que, finalement, il l'eût vraisemblablement tuée. La guerrière n'apprécia pas vraiment ce changement de formulation, étant noble, on lui avait appris à déceler les différences de ce genre, qu'est-ce que ça avait été fastidieux. Cherchait-elle à... L'amadouer? Quoi qu'il en soit, depuis qu'elle saisissait les différences, elle ne les avait jamais appréciées. Dans son état d'énervement, c'était suffisant pour ne pas s'en soucier. L'élan de gaminerie de Seraphina ne changea rien, le choix de Faera était fait : elle ne pouvait pas rester là et comptait aller dans les tribunes, beaucoup moins pratique pour retrouver Bolan mais elle devait bouger.

«Bon, maintenant je vais régler ce que je dois régler, dit-elle avant de marquer une pause pour ensuite continuer, seule.»

Ce dernier mot n'avait pas été prononcé méchamment, mais on le sentait emprunt d'autorité, elle n'avait pas vraiment envie d'être contestée.